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CHRONIQUE MECANIQUE

CHRONIQUE MECANIQUE

L'oeil critique de Jean Vacances sur le cinéma - Retrouvez également la page Facebook du blog : www.facebook.com/ChroniqueMecanique


SINISTER

Publié par JeanVacances sur 22 Mars 2013, 17:32pm

sinister_300.jpgUn film de Scott DERRICKSON

  Épouvante/Fantastique + États-Unis + Couleur + 1h46 

Sortie française le 7 novembre 2012

Scénario de Scott Derrickson et C. Robert Cargill

Produit par Jason Blum et Brian Kavanaugh-Jones
INTERDIT AUX MOINS DE 12 ANS

 

De quoi ça parle ? 

Ellison Oswalt, écrivain travaillant sur des faits criminels ayant réellement eu lieu, emménage avec sa petite famille dans une nouvelle maison. Ce qu'il s'est gardé de leur dire, c'est que l'endroit en question a été le théâtre d'un quadruple meurtre non-élucidé sur lequel il va baser son prochain livre. Au grenier, Ellison tombe par hasard sur un carton renfermant un appareil de projection et des films en Super 8. En visionnant ce qui ne semble qu'être de simples souvenirs de famille, il ne va pas tarder à découvrir des images bien plus effrayantes qui pourraient bien assurer le succès de sa nouvelle oeuvre mais aussi le plonger, lui et les siens, dans un horrible cauchemar...

 

C'est avec qui ?
ETHAN HAWKE > Ellison Oswalt + JULIET RYLANCE > Tracy Oswalt + JAMES RANSON > L'officier délégué + VINCENT D'ONOFRIO  > Le Professeur Jonas  +   FRED DALTON THOMPSON  > Le shérif  + CLARE FOLEY > Ashley Oswalt + MICHAEL HALL D'ADDARIO > Trevor Oswalt + NICK KING > Bagul


sinister-grande1.jpg


Et ça donne quoi ?  2
Si vous souhaitez être à la mode lorsque vous parlez du cinéma d'horreur indépendant US où les esprits les plus diaboliques hantent la pellicule, LE nouveau nom à citer dans la conversation est celui du producteur Jason Blum. Après Paranormal Activity et Insidious, il remet le couvert avec une recette qui est sensiblement la même : un couple menant une existence tout ce qu'il y a de plus tranquille se trouve être la proie d'une maléfique aventure paranormale. Si la recherche millimétrée d'une terreur à l'efficacité redoutable est toujours au menu de cette nouvelle production, le cruel manque de surprise et d'originalité l'est tout autant. De ce fait, Sinister, bien que possédant une forme plastique (et sonore) tout à fait correcte et faisant sans cesse preuve d'une folle envie, n'arrive jamais à convaincre réellement, à fédérer la séduction autour de lui. Le sentiment est étrange, le film est plutôt réussi dans l'ensemble mais ne remporte pourtant pas l'adhésion. La faute à un scénario d'une incroyable paresse qui traîne ses grosses godasses pour nous servir un plat déjà goûté jusqu'à l'indigestion, mais aussi à la sous-exploitation d'une double-lecture sur le pouvoir de fascination morbide des images qui aurait mérité d'être davantage mise en avant. En dépit d'une ambiance parfois flippante, cause de quelques sursauts, et d'un Ethan Hawke (comme toujours) très bon, la mise en scène du dénommé Scott Derrickson est totalement impersonnelle, rarement inventive, et ce Sinister souffre beaucoup du fait de ne chercher à s'adresser qu'en priorité à l'ado en quête de sensations fortes et à sa petite amie pour leur rendez-vous du samedi après-midi au multiplexe du centre commercial. Si les films estampillés Jason Blum ne sont pas non plus à faire tomber les amateurs de frissons dans la sinistrose, on ne peut pas dire qu'ils aient révolutionné un genre déjà saturé en quoi que ce soit. Et c'est bien dommage.
Les histoires d'esprits, de possessions et de lieux hantés sur grand écran c'est un peu comme les incohérences de scénario et le piètre jeu d'acteurs dans Plus belle la vie : autrement dit, une véritable religion. Déjà à l'époque où le cinéma ne hurlait pas encore, le suédois Victor Sjöstrom attelait d'angoissants revenants sur sa Charrette fantôme. Puis il y a eu les grands classiques des 70's, de L'exorciste de Friedkin à Amityville de Stuart Rosenberg, en passant par Damien, la malédiction de Richard Donner. Et même, pas la peine de remonter aussi loin. Quasiment chaque mercredi sort en salles un nouvel opus du genre destiné à effrayer les teenagers. A tel point que le téléchargement d'applications anti-possession pour smartphones ferait fureur. Bref, tout ça pour dire que l'occulte au cinéma c'est une vieille école, un filon très régulièrement exploité. Et le tandem Scott Derrickson/Jason Blum surfe allégrement sur cette vague avec un certain savoir-faire, il faut bien l'avouer. Seul (et gros) hic, il ne se sert en aucun cas de sa belle planche pour inventer de nouvelles pirouettes. Hormis le plan fixe inaugural filmé en Super 8, parfait et semblant annoncer quelque chose d'attractif, ce qui suit n'est rien de plus qu'un concentré pur jus de lieux communs : un écrivain en très nette perte de vitesse s'installe avec sa femme et ses deux gosses dans la bâtisse où une famille s'est fait trucider, dans le but d'écrire une contre-enquête. Une légende funeste et macabre entoure ce lieu. Un autochtone au comportement hostile tente de prévenir le nouvel arrivant du danger (en l'occurrence là c'est un shérif, ce qui change un peu du pompiste habituel). Évidemment, la maison semble vivante et là pour vous tourmenter. Évidemment, les deux rejetons de l'écrivain sont les parfaits cousins du Danny Torrance de Shining (comprenait par là qu'ils sont un brins médiums). Évidemment, tout cela couve une belle crise de couple et une remise en question de la famille. Pas besoin d'être un coutumier du genre pour le deviner : le scénario de ce film, calqué sur des dizaines de scripts déjà existants, est d'un ennui des plus sinistres.


"Le tandem Derrickson/Blum surfe allègrement sur la vague de l'occulte au cinéma avec un certain savoir-faire, il faut bien l'avouer. Seul (et gros) hic, il ne se sert en aucun cas de sa belle planche pour inventer de nouvelles pirouettes."


Les vieux engrenages utilisés pour faire tourner ce mécanisme ne nous surprennent guère tant ils ont déjà servis jusqu'à en émettre un son grinçant causé par la rouille, et personne n'a pris la peine de les huiler un peu. On a donc un mal fou à prendre pleinement part à cette histoire pourtant très bien pensée, jusqu'à venir à se demander si le montage n'aurait peut-être pas du amputer le film de certaines scènes afin de le rendre plus efficient. Derrickson sait créer de l'angoisse avec sa caméra, pas de problème là-dessus. Mais sa mise en scène, bien trop classique, souffre d'un académisme criant. Et si Ethan Hawke tire parfaitement son épingle du jeu dans la peau recouverte de frissons de cet écrivain pas loin de sombrer dans la démence, le reste du casting n'est pas vraiment mis en valeur, comme en témoigne l'utilisation du principal personnage féminin ou de ce savoureux shérif-adjoint, relégués à de la figuration. Les aficionados de la série New York, Section Criminelle et les fans du Maître Stanley Kubrick se consoleront comme ils pourront avec la participation de Vincent D'Onofrio, acteur gravé dans la légende du septième art depuis son interprétation hallucinée du mythique soldat Baleine de Full Metal jacket.

 

"Les vieux engrenages utilisés pour faire tourner ce mécanisme ne nous surprennent guère tant ils ont déjà servis jusqu'à en émettre un son grinçant causé par la rouille (…) On a donc un mal fou à prendre pleinement part à cette histoire pourtant très bien pensée."

 

En dépit de son incroyable classicisme empêchant de l'apprécier à sa juste valeur, Sinister frappe toutefois fort sur quelques points, comme le travail sur la bande-son effectué par le compositeur Christopher Young, absolument bluffant. Et puis il y a ces films en Super 8 qui ont atterris on ne sait comment dans le grenier, à la fois portes de l'Enfer et clés de la Malédiction. Ce qui s'apparente être de sympathiques films de famille sont en réalités de terrifiantes archives illustrant de véritables pogroms, sur lesquels on prierait de ne jamais laisser un oeil traîner, même si de le faire on ne pourrait toutefois s'empêcher, tant le spectacle de l'effroi nous attire inconsciemment. Mais encore une fois, l'allégorie d'un voyeurisme malsain n'est qu'effleurer, pas creuser. Le final, qui fait basculer un film jusque-là totalement exsangue dans l'horreur pure, est symptomatique des maux de ce long-métrage : bien que réussi et évitant de se vautrer dans le grotesque (talon d'Achille de nombreuses productions de ce genre), il est cependant complètement prévisible. Et bien trop explicatif aussi. Reste que certaines séquences vous colleront littéralement le trouillomètre à zéro à vous en faire bondir de votre siège. Et lorsque l'on souhaite visionner un bon petit film d'horreur, c'est ce que l'on recherche avant-tout non ?

 

sinister-petite1-copie-1 sinister-petite2.jpg

 

Quelques trucs à savoir sur le film pour se la péter en société

+ Scott Derrickson, réalisateur et co-scénariste du film, est né au Portugal au milieu de années 70. Il part ensuite vivre aux États-Unis, terre de ses parents, où il étudie le cinéma à l'université de Californie du Sud, et, après le passage classique par la réalisation de quelques courts-métrages, il signe le scénario du film d'horreur Urban Legend 2 en 2000. Cette même année, il met également en scène sa première oeuvre avec le cinquième volet de la saga Hellraiser, qui ne sort toutefois pas en salles mais directement en DVD. Son premier véritable film pour le cinéma, L'exorcisme d'Emily Rose, avec Jennifer Carpenter (connue pour son personnage de Debra dans la série Dexter), est très remarqué et remporte même la récompense du meilleur film d'horreur au Saturn Awards de 2006. Ce qui vaut à Derrickson d'être ensuite choisi pour réaliser un blockbuster hollywoodien avec Keanu Reeves et Jennifer Connelly, Le jour où la Terre s'arrêta (remake d'un classique de la SF des années 50), mais le film est assassiné par la critique et fait un flop auprès du public. Suite à ce cuisant échec, le réalisateur revient donc au cinéma indépendant avec ce Sinister. A noter que Derrickson, dont le CV est jalonné de films d'horreurs ou fantastiques, à fait une entorse à ses amours cinématographiques en participant à l'écriture d'un scénario dramatique pour Wim Wenders en 2004, Land of plenty.

 

+ L'idée du script de Sinister a germé dans l'esprit du co-scénariste C. Robert Cargill suite à un cauchemar fait une nuit par celui-ci après le visionnage du film japonais Ring d'Hideo Nakata. Quelques temps plus tard, Cargill fait la connaissance de Scott Derrickson et lui parle de son idée autour d'un verre dans un bar. Captivé et très intéressé, le réalisateur discute alors du film avec son nouveau scénariste jusqu'au petit matin en ingurgitant finalement non pas un mais plusieurs cocktails. Les deux acolytes rédigeront ensuite le script à quatre mains.

 

+ Lors de sa sortie en France, Sinister a créé une petite polémique et une quarantaine de salles a tout bonnement refusé de le diffuser. Non pas à cause de son contenu, mais à cause du comportement tout à fait scandaleux de plusieurs spectateurs lors de la projection quelques jours plus tôt d'un autre film du même genre, Paranormal activity 4, dans une salle de Mantes-la-Jolie (78) et une autre de Montataire dans l'Oise. Effectivement, des bandes d'adolescents (apparement d'une grande intelligence et d'une incroyable finesse) ont été jusqu'à uriner sur les sièges pendant la projection du film, et insulter d'autres spectateurs. Des caissiers ont même été agressés et les comptoirs de confiserie pillés. La société de distribution Wild Bunch a donc annoncé la déprogrammation de Sinister dans de nombreuses salles après le refus de plusieurs d'entre elles de le diffuser afin d'éviter que ce genre de comportement ne se reproduise.

 

+ Très remarquée, la composition de la musique du film est signée Christopher Young. Si ce nom ne vous dit peut-être rien du tout, l'homme est pourtant un véritable spécialiste dans la création de bande-son pour le cinéma d'épouvante, puisqu'il a déjà officié sur Freddy 2 (1985), Hellraiser de Clive Barker (1987), La part des ténèbres du grand George A. Romero (1993), le remake américain de The grudge (Takashi Shimizu, 2004), ou encore The secret du français Pascal Laugier (2012). Il a également collaboré à trois reprises avec Sam Raimi (sur les volets 2 et 3 des aventures de Spiderman, et sur le film d'horreur Jusqu'en enfer), et avait déjà travaillé avec Scott Derrickson sur L'exorcisme d'Emily Rose.

 

+ Quant au montage du film, il a été effectué pour le coup par un petit frenchie, Frédéric Thoraval, monteur de Angel-A de Luc Besson, de Taken de Pierre Morel, ou encore de L'assaut de Julien Leclercq, et qui effectuait ici sa première expérience aux Etats-Unis.

 

+ Ethan Hawke et Vincent D'Onofrio ont décidement pris l'habitude de se retrouver sur les plateaux de tournage. En effet, les deux acteurs, amis dans le privé, font ici leur sixième film ensemble, après notamment Le gang des Newton (Richard Linklater, 1998), Little New York (James DeMonaco, 2009) ou L'élite de Brooklyn (Antoine Fuqua, 2010).

 

+ Malgré le propos sombre et horrifique de son long-métrage, Scott Derrickson a déclaré que le tournage s'était déroulé dans la bonne humeur et la convivialité la plus totale, à tel point qu'il avait parfois l'impression, selon ses dires, de tourner un film léger. Cet esprit très positif qui régnait sur le plateau est en grande partie du au fait que Derrickson a été laissé entièrement libre de ses choix artistiques et professionnels par les producteurs : "c’est la première fois de ma vie que je tournais un film en toute liberté. Je n’ai pas dû apporter de changements au scénario en fonction des remarques du studio, et j’ai conservé la maîtrise du montage final."

 

+ Bagul, l'eprit démoniaque qui sévit ici, est un personnage totalement inventé lors de la rédaction du script et n'appartient donc à aucune mythologie. Son interprète à l'écran, Nick King, est avant-tout réputé pour être un cascadeur et une doublure, qui a déjà officié sur The green hornet de Michel Gondry, Paranormal activity 3, ou Le dernier rempart avec Schwarzy.

 

+ Sinister a été tourné avec un petit budget de 3 millions de dollars mais a largement été amorti lors de son exploitation en salles dans le Monde, puisqu'il a rapporté un peu plus de 87 millions de dollars au box-office international. Le tournage a lui environ duré 3 semaines entre septembre et octobre 2011.

 

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